
Pour tous les amoureux du vintage, du fait main et qui aiment l’idée de redonner une seconde vie à des bijoux chargés d’une forte symbolique, vous allez aimer découvrir Stéphanie et sa marque « B L I S S » qu’elle décrit comme « le vintage en héritage ». Ses créations sont remplies d’histoires, fabriquées à partir de pièces vintages, chinées. Elle laisse parler sa créativité et son inspiration pour créer des bijoux que l’on porte sur soi comme un porte-bonheur ou un talisman.



Je vous laisse découvrir le portrait de Stéphanie, son histoire et son parcours qui l’ont mené à créer sa marque de bijoux upcyclés, B L I S S.
Interview de Stéphanie
Peux-tu te décrire en quelques mots ? Quel est ton parcours ?

Je suis Stéphanie, j’ai 42 ans et je viens d’une formation d’architecte d’intérieur et de designer. J’ai su très tôt que je voulais faire un métier artistique et créatif, cela m’a toujours animée depuis mes 13 ans. J’avais à cette époque pas d’apriori sur les métiers de l’art et je ne savais pas encore quelle voie empruntée. J’ai donc fait 5 années d’étude d’art puis je me suis dirigée très vite vers l’architecture d’intérieur et plus particulièrement dans le domaine du « Retail Design ». Le Retail design c’est la manière de travailler une image de marque d’un point de vue architecturale. L’objectif est d’être capable de reconnaitre une marque à la première vision d’une boutique et de mettre en avant de la meilleure manière qu’il soit les produits que vend la marque, partout dans le monde. C’est à dire : « Transformer une image de marque en architecture et en désir d’achat. »
J’ai travaillé à mon compte, pour de grands magasins notamment, mais aussi en agence et actuellement je travaille pour un grand groupe de cosmétiques. Avec le temps, je me suis rendu compte que plus mon métier était passionnant plus il était prenant mais il s’éloignait aussi petit à petit de la création. Avec un travail très prenant et deux enfants on a finalement très peu de temps pour soi. Ces dix dernières années j’avais abandonné toutes mes activités créatives, ne serait-ce que mon carnet de croquis. Je ressentais donc le besoin d’avoir une sorte de « soupape » artistique à coté de mon travail. J’ai recommencé d’abord en faisant des croquis et en chinant.
Comment t’es venu l’idée de B L I S S ?
Depuis mon enfance, je suis entourée d’objets anciens chez mes parents, mes grands-parents. Il y a toujours eu autour de moi un véritable amour de l’ancien, de la filiation et du voyage. A travers les voyages j’apprenais à découvrir des cultures et croyances différentes, je ramenais des souvenirs et des objets que je conservais. Tout cela formait mon univers mais je n’en faisais rien. J’ai commencé à réfléchir à une activité et un été pendant mes vacances en Bretagne, je chinais et je suis tombée sur des lots de médailles anciennes. J’ai trouvé cela très beau. C’étaient des médailles religieuses, certaines étaient très travaillées et d’autres plus simples, très probablement du 19ème. J’ai trouvé très triste de voir cette culture, qui tourne autour des croyances, disparaitre. Au fil du temps j’ai commencé à en acheter de plus en plus et mon stock grandissait, je me suis dit à ce moment-là qu’il fallait que j’en fasse quelque chose sinon cela tournerait à la collection.
J’ai commencé également à acheter des chaines de seconde main pour créer des bijoux avec ces médailles et donc leur donner une deuxième vie. Mes premières créations étaient pour moi puis très vite mes amies m’ont conseillé d’ouvrir une boutique en ligne. J’ai commencé à le faire au début sans me rendre réellement compte de l’aspect écologique de mon travail. C’est avec le temps que cela a commencé à prendre un réel sens dans mes créations.
Quelles sont les valeurs que tu défends à travers B L I S S ?
Il y a une réelle quête de sens dans ce que je fais car je veux redonner une seconde vie à des objets qui ont une forte symbolique (médaille, croix, buddha, œil grec, éléphant…). Pour moi tous ces objets ont exactement la même valeur, la valeur des croyances que ces objets renferment en eux : leur pouvoir, leur protection… Il y a donc, dans un premier temps, un message spirituel : « peu importe ce à quoi on croit, ce qui est important c’est qu’on y voit ». Je voulais aussi avoir un message de transmission et de filiation et enfin il y a une quête d’esthétique et d’intemporalité. Je ne veux pas tomber dans une mode, une tendance. Le bijou de l’été ne m’intéresse pas, je cherche à ce que mes bijoux soient intemporels et se transmettent. Je suis fondamentalement anti sur-consommation et anti Fast-fashion.
Il y a un réel engagement écologique et social dans mon travail à travers l’upcycling, c’est comme un engagement personnel que je prends à ne pas avoir d’impact écologique supérieur en recréant un bijou. Les pièces qui composent mes bijoux sont majoritairement de seconde main, les emballages sont en papier et les papiers de soie sont recyclés. Les présentoirs et plateaux pour mettre en valeur les bijoux pendant les ventes sont également issus du recyclage (échantillons de pierres, morceaux de bois…).
Je vois énormément de marques qui se créent et pour moi ce sont juste de nouveaux bijoux même s’ils peuvent être très jolis. Il faut réfléchir à qu’est-ce qu’on peut amener de plus que simplement de créer une nouvelle marque de bijoux. C’est ce qui est important pour moi. Qu’est-ce que je peux apporter de plus que juste un joli collier ?



Où trouves-tu tes matières premières ?
Mon grand regret c’est que je n’ai pas encore fait de formation de joaillerie ou dans la création de bijoux. Pour l’instant je fais de l’assemblage, j’aimerais un jour aller plus loin dans mes créations.
80% de ce que j’assemble sont des pièces chinées. Je chine principalement en Bretagne où il y a beaucoup de brocantes, d’antiquaires, de vide-greniers où l’on peut trouver ce type de pièces religieuses. Cela ne me pose pas de problème que la médaille ne soit pas très ancienne, en revanche elle doit avoir déjà eu une vie et donc qu’elle soit de seconde main. Il y a des médailles dans des métaux qui s’altèrent plus vite que d’autres, certaines ont même les traces de dents des enfants qui les ont mordus quand ils étaient bébés… j’aime cela. Je n’achèterai jamais des médailles vendues par lot de 1000 venues de Chine. Je trouve ça dramatique de voir des médailles produites par des entreprises qui n’ont aucune notion de ce que ces médailles peuvent représenter d’un point de vue symbolique et croyance. Ce sont des objets spirituels, sacrés, que l’on y croit ou non. Du temps où on pouvait voyager, je ramenais aussi des pièces chinées dans des endroits très différents tels que Toronto, Mexico, Thaïlande, Athènes… Ces pièces proviennent par exemple de temples. La connotation spirituelle (porte-bonheur, talisman, on appelle cela comme on veut) reste toujours présente peu importe la croyance.
Les 20% restants sont des chaines, des apprêts, des fermoirs et anneaux que j’achète à une entreprise française, toujours en matériaux de qualité : de l’argent ou du laiton plaqué or, pour la plupart.
Quel est ton processus de création ?
Je ne fais jamais de croquis préparatoire, l’inspiration arrive quand j’ai les pièces en face de moi. Le process peut parfois prendre beaucoup de temps, je peux garder des pièces deux ans avant d’en faire une création. Il faut trouver la bonne association, le bon duo ou trio avec la bonne chaine. Je peux rester des semaines sans créer et d’autres, réaliser 50 bijoux, je laisse l’inspiration me guider. Je ne fais pas de collection ou de colliers qui répondent à des tendances.



Est-ce-que tu as suivi une formation particulière ?
J’ai fait 5 années d’étude à l’école d’art Penninghen, dont 4 ans de spécialisation en architecture d’intérieur et design. Ces années m’ont permis d’acquérir des notions de volume, de conception. Avec ces études on peut tout à fait se diriger dans le graphisme, la mode, la photo… Cela a surtout été pour moi 5 années de rigueur, de recherche de la perfection qui m’ont beaucoup apporté. Cela m’a donné l’amour des pièces parfaites et des créations uniques. Mais aujourd’hui j’aimerais aller plus loin et faire une formation complémentaire dans le domaine de la création de bijoux. Je lis beaucoup de livres, je parcours les musées, je suis très inspirée par la mode du 19ème siècle et les années 70.
Mais je verrai plus tard pour cette formation complémentaire car pour l’instant mon temps libre est dédié à la création de mes bijoux mais aussi à mes filles car elles sont en âge où elles s’intéressent à tout, je commence à leur transmettre ma passion. Ma fille cadette s’implique d’ailleurs beaucoup en m’aidant à organiser les évènements pour mes ventes physiques. Elle a des vrais talents d’organisatrice, c’est elle qui fait les paquets, qui prépare les produits pour la vente, c’est également elle qui met en place les bijoux et gère les stocks, toujours en s’amusant.
Où peut-on retrouver les créations B L I S S ?
J’ai beaucoup cherché un format qui me convenait, ça été compliqué de trouver. Le premier noël j’ai fait une vente physique qui s’est très bien passée mais la plupart des formats proposés à Paris pour les petits créateurs ne sont pas du tout adaptés et rentables. La deuxième année, je me suis donc concentrée uniquement sur le site web, cela ne fonctionnait pas bien. Et puis j’ai commencé à faire des ventes sur des formats plus amicaux et conviviaux. La créatrice des Carnacoises m’a proposé une vente dans un restaurant en bord de plage où des cours de yoga étaient organisés. Cela a très bien fonctionné, j’en ai donc fait plusieurs sous ce format. À Paris, j’ai fini par trouver une petite boutique dans le 1er arrondissement que j’adore. Je loue la boutique à différents moments de l’année pour des évènements. L’avantage de ce format c’est que je peux pendant quelques jours décorer l’endroit comme j’en ai envie, je prends le temps de parler avec des gens, de boire un café et de faire découvrir mon univers. Je prends beaucoup de plaisir à expliquer le bijou, d’où il vient et sa symbolique.



Quel est ton plus gros challenge au quotidien ?
La gestion de mon temps est un vrai challenge car je cumule plusieurs activités. Cependant je suis une couche tard et je profite donc de ce moment privilégié pour créer, cela m’aide à me recentrer, à me détendre, c’est ma méditation à moi. J’évacue la pression de ma journée de travail. Avec la COVID j’ai également profité des week-ends enfermés à la maison pour créer. Il est souvent dur de trouver un juste équilibre entre le temps de création et le temps pour toutes les activités qui tournent autour : les photos, l’animation du compte Instagram, le site web…
Mais j’aime tellement ce que je fais que je n’ai pas du tout la sensation d’être surmenée.
Qu’est-ce-qui te passionne le plus dans ce que tu fais ?
J’adore chiner et cela me manque énormément depuis que nous sommes dans cette période de pandémie, heureusement il y a internet mais ce n’est pas pareil. J’aime l’idée de découvrir des pépites, de voir de l’intérêt dans ce que peut-être d’autres ne voient pas. J’aime aussi tout particulièrement voir un bijou se créé et prendre forme. Prendre des matières premières, les travailler pour en faire un objet fini est une sensation vraiment fantastique. Et enfin j’aime prendre le temps de parler à mes clients, même si peut-être on ne se rencontrera physiquement jamais comme par exemple discuter avec des personnes qui viennent des Etats-Unis, c’est extrêmement enrichissant. Il y a un lien qui se crée.




Fais-tu du sur-mesure ?
Oui bien sûr, il existe deux cas pour cela :
- Soit la personne a depuis longtemps des médailles, des gris-gris, des bijoux anciens qu’elle ne porte plus mais qui sont porteurs de souvenirs et de croyance. La personne me les envoie et on voit ce qu’on peut en faire. Je propose en générale trois types de créations et elle choisit celle qu’elle préfère.
- Soit la personne recherche une médaille en particulier, une médaille qu’elle avait petite ou que sa grand-mère portait… Dans ce cas je chine spécialement pour elle et je crée à partir de cela.
Ressens-tu un engouement pour la seconde main et le vintage ?
Oui clairement et je pense que cela va perdurer. En ce qui me concerne cela est une passion que j’ai depuis très longtemps, ce n’est absolument pas calculé. Je travaille en éco-conception depuis plus de 10 ans en architecture d’intérieur. Faire de la création éco-conçue est quelque chose sur laquelle je réfléchie et je travaille depuis 2009. Depuis que je suis enfant, que ce soit à travers mes parents ou des voyages j’ai été sensibilisée aux problèmes d’écologie et de protection de l’environnement. Réaliser mes bijoux dans cette logique là est juste naturel et j’espère transmettre cela à mes enfants. Ils représentent l’avenir sur ces sujets.
Quelles sont tes sources d’inspiration ?
Je suis très inspirée par le 19ème siècle, que ce soit par la littérature, la mode, la peinture mais aussi le mobilier de cette époque. C’est une période très éclectique pendant laquelle il y a eu énormément de mouvements très variés qui étaient inspirés très majoritairement de l’histoire, de l’antiquité et c’est aussi le siècle de la révolution industrielle… En 100 ans c’est une multitude de styles qui se sont succédés et même dans le monde des bijoux.
J’adore aussi le style 70s, sa liberté, sa féminité. La silhouette idéale et encore si contemporaine. Des bijoux ethniques et des chaines en or des chics qui se mélangent parfaitement. De véritables parures mi-hippie, mi-bourgeoise.



Quels sont tes projets futurs ?
Mon défi est de parvenir à maintenir la croissance de ma marque que je vis maintenant depuis un an. J’ai vraiment envie de continuer dans cette activité qui me gratifie personnellement et ne pas perdre cet engouement et ce plaisir que je ressens à créer mes bijoux.
Qu’est-ce-que nous pouvons te souhaiter pour l’avenir de B L I S S ?
J’adorerais travailler sur des collaborations avec des créateurs venant d’autres univers comme la mode ou la décoration par exemple et qui sont dans cette même démarche d’upcycling. Je suis sûre que cela donnerait naissance à de belles idées de créations basées sur des valeurs communes et un gout partagé pour l’esthétique. Je suis persuadé qu’à plusieurs on est plus fort pour faire passer des messages et défendre des idées.
J’aime tout particulièrement les marques telles que « Breizh Club » ou « Ty Coz » pour leur origine bretonne revendiquée et leur humour décalé, « Féministe Paris » pour leur engagement, « Les Récupérables » pour leur concept de récupération de chutes de tissus pour faire des vêtements, « MountainGirl » pour leurs créations hyper féminines à base de laine et tissus recyclés, La Compagnie Française de l’Orient et de la Chine (CFOC) pour leur invitation au voyage et à la délicatesse de l’artisanat (j’adorerais faire pour eux une collection à base de talismans bouddhistes et traditionnel asiatiques), Girls in Paris pour la pureté de leur lingerie. L’univers de la danse me fascine également. Les ballets contemporains mais aussi l’atmosphère de l’opéra Garnier, les coulisses, les décors et leurs costumes incroyables.
As-tu un message que tu aimerais faire passer ?
Même si on a parfois la sensation d’être tout petit, on peut tous avoir un impact positif sur le monde qui nous entoure. On a tous un rôle à jouer. Cela ne paraît pas grand-chose, mais petit à petit notre voix sera forte.
Un peu plus de B L I S S…
N’hésitez pas à découvrir les magnifiques créations de B L I S S sur son site officiel et à suivre la marque sur son compte Instagram pour être au courant de son actualité.
Photos : B L I S S
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